Par Laure Devaux Allisson, pasteure
Écouter "Adieu ma bulle"
Journée pluvieuse et frisquette, lovée dans mon fauteuil préféré comme dans une bulle, je pense à ces dernières semaines passées à la maison… quelques pensées personnelles, livrées ici sans filtre ni artifice.
Depuis le début de la crise, je vis dans une bulle. Je me considère comme une confinée privilégiée: je ne suis pas une personne dite “à risque”, mes proches non plus. J’habite à la campagne, la forêt est juste à côté, il a fait beau temps pendant six semaines, mes deux enfants scolarisés se sont mis volontiers au travail pour l’école, les deux plus jeunes sont plutôt sympas!
Mon mari a aussi dû rester à la maison dès le début. Et moi, travailler à domicile, je connais! Pour nous, ça a été facile.
Dans ma bulle, il y a de l’espace pour travailler. Mes mandats de coordinatrice et en catéchèse ont impliqué de très vite réorganiser, annuler – ça, ça a a été difficile, repenser, informer, mettre en lien. J’ai clairement fait exploser mon temps de travail les premières semaines, mais il n’y a pas de souci pour moi, cela fait partie du job. Et je dois l’avouer, j’aime bien!
Dans cette émulation partagée en équipe a émergé un festival d’idées, de créativité pour finalement aboutir à des projets dont je vous parlerai dans un prochain billet. ça, j’aime beaucoup!
Dans ma bulle, il y a eu plus de volume de travail, mais franchement moins de stress que d’habitude! Et ça, ça m’interpelle…
Dans ma bulle, on fait les fous, on rigole, on se raconte plein de trucs bêtes ou super sérieux, on découvre des séries sur Netflix, on fait plein de balades, on fait du jardin, on bricole, on construit des hôtels à insectes.
Et dans ma bulle, on sait dire merci. On est très reconnaissant pour les moments privilégiés partagés en famille. Bien sûr, il y a à peu près toujours un enfant sur les quatre qui nous tend les nerfs et on a par précaution mis des matelas sous les fenêtres… mais non, je rigole!!!
Dans ma bulle, pour la première fois de ma vie de maman, je partage tous les repas du soir en famille. Je ne suis pas à une séance pour le boulot ou à une répétition de chant. Je savoure la désormais rituelle lecture du soir de la saga de Harry Potter. Et j’aime ça!
Pour la première fois de ma vie de maman pasteure, je l’ai trouvé, le fameux équilibre entre vie privée et vie professionnelle! Dans la quiétude de ma bulle, connectée à l’enthousiasme du monde extérieur.
Dans ma bulle, il y a aussi de l’espace pour toutes les couleurs, pour être triste parfois, pour s’ennuyer, pour ne rien faire, pour réfléchir, pour rêver.
Et dans ma bulle, il y a de l’espace pour créer. Ce blog, ça fait quatre ans que j’y pense, que j’ai envie d’y donner vie. Et tout à coup, c’est possible: il n’y a plus le complexe d’être à la hauteur, il n’y a plus de question de légitimité. Je me lance. Et j’aime!
Pourtant, ma belle, ma tendre bulle, je dois la quitter. Et je n’ai pas envie. Je sais bien que la vie se joue à l’extérieur aussi. Mais je ne veux pas…
Et j’ai un peu peur… Peur de sortir et que tout soit comme avant, peur d’être aspirée de nouveau dans le tourbillon de mes habitudes et de mes obligations. Peur de perdre le précaire équilibre découvert et tant aimé.
Ma bulle, je savoure encore quelques instants ta douceur et ta chaleur. Je profite de tes derniers rayons de magie et de possible.
Adieu ma bulle.